Donation d’entreprise : le strict respect des conditions

Une nouvelle décision de la Cour de cassation met en lumière des points de droit fiscal essentiels concernant l’exonération partielle des droits de mutation à titre gratuit, prévue par l’article 787 B du Code général des impôts (CGI). Le litige porte sur l’application du Pacte Dutrreil à une donation de titres.

Cet article propose une analyse des aspects juridiques de la décision, en éclairant les interprétations légales et leurs impacts sur les pratiques de donation d’entreprise.

Contexte et faits en cause

En juin 2011, une donation  de 204 actions est réalisée par le président du conseil de surveillance d’une société. Il est que ces donations bénéficient de l’exonération partielle des droits de mutation à titre gratuit en vertu de l’article 787 B du CGI, ce qui est initialement accepté par les services fiscaux.

Cependant, en décembre 2016, l’administration fiscale conteste cette exonération au motif que les conditions requises par l’article 787 B du CGI n’auraient pas été remplies. Le contribuable est donc finalement contraint de payer les droits éludés avec les intérêts de retard, ce qui l’amène à engager une procédure judiciaire.

Les arguments sont les suivant : les conditions de l’article 787 B, notamment le respect de l’engagement collectif de conservation des titres et l’exercice d’une fonction de direction au sein de la société par le donateur, sont remplies. En effet, le contribuable soutient que le texte permet au donateur de figurer parmi les associés exerçant une fonction de direction post-donation, ce que la Cour d’appel a rejeté.

L’interprétation stricte de le Cour

La Cour d’appel, confirmée par la Cour de cassation, interprète strictement les termes de l’article 787 B. Elle estime que le texte exclut explicitement que le donateur puisse être considéré comme l’un des associés exerçant une fonction de direction nécessaire pour l’application de l’exonération. Cette interprétation est fondée sur une lecture littérale des dispositions, mettant en avant que l’engagement doit être réalisé « avec d’autres associés ».

La Cour de cassation a opté pour une interprétation stricte de l’article 787 B, d, en se concentrant sur le texte même de la loi qui spécifie que l’engagement doit être maintenu par les associés ou les bénéficiaires de la transmission.

Cette interprétation a des conséquences significatives pour la pratique des donations d’entreprise, car elle implique que les donateurs doivent non seulement structurer soigneusement les transactions pour répondre aux exigences formelles, mais aussi assurer le suivi et le respect continu de ces engagements.

L’importance de l’engagement de conservation

Selon les dispositions concernant le Pacte Dutreil, l’exonération est conditionnée par un engagement collectif de conservation des parts ou actions qui doit être en vigueur au moment de la transmission et doit continuer à être respecté pendant trois ans après celle-ci.

Plus spécifiquement, cette exemption est octroyée uniquement si l’une des personnes bénéficiaires de la transmission (héritiers, donataires, légataires) exerce effectivement dans l’entreprise une fonction de direction ou son activité professionnelle principale.

Cette exigence renforce la notion que l’exonération fiscale est liée non seulement à la possession mais aussi à l’engagement actif dans la gestion de l’entreprise.

La décision clarifie que dans le cas d’un engagement collectif réputé acquis, il est impératif que les fonctions de direction soient exercées par les donataires, et non par le donateur. Cela crée une distinction nette entre le rôle du donateur dans la mise en place de l’engagement et le rôle actif des donataires dans la gestion post-transmission.

Cette distinction est essentielle pour la validité de l’exonération fiscale et renforce l’idée que l’engagement dans l’entreprise doit être réel et substantiel.

Pacte Dutreil : outil de de transmission d’entreprise

Le Pacte Dutreil permet une transmission d’entreprise facilitée avec un régime fiscal avantageux, sous réserve que certaines conditions soient remplies, notamment la détention des titres par le donateur (ou son conjoint, partenaire pacsé ou concubin notoire) pendant au moins deux ans avant la transmission.

Cette règle souligne la stabilité dans la détention des titres comme un prérequis essentiel pour bénéficier de l’exonération. En outre, la fonction de direction ou l’activité professionnelle principale doit être exercée par une des personnes engagées dans le pacte, ajoutant une couche supplémentaire d’engagement personnel au critère de détention des titres.

La rigueur avec laquelle la Cour de cassation applique les dispositions de l’article 787 B du CGI met en lumière la complexité du droit fiscal français en matière de transmissions d’entreprise.

Cette décision ne se contente pas de résoudre un litige fiscal ; elle établit également un précédent sur la manière dont les dispositions fiscales doivent être interprétées et appliquées dans des cas concrets.

Pour les praticiens du droit, les conseillers fiscaux, et les entrepreneurs, cette décision est un rappel que la planification fiscale nécessite une attention méticuleuse aux détails légaux et une compréhension approfondie de l’interaction entre les différentes dispositions du CGI. Elle souligne également l’importance de l’engagement actif et continu dans la gestion de l’entreprise comme un élément central pour bénéficier des régimes d’exonération fiscale en France.

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